Récit poignant d’une jeune juive pendant la guerre

En février 2019, Mme Testyler, une rescapée de la rafle du Vél d’Hiv est venue au collège Christine de Pisan. Voici son témoignage.
Enfants juifs pendant la rafle du Vel d'Hiv
« Je n’étais pas une fille très sage. Dans mon école les filles et les garçons étaient séparés. J’aurais bien voulu avoir comme vous une école mixte car j’étais une petite fille qui adorait chahuter, et les filles pleurent dès qu’on leur tire un peu les cheveux. Mais en classe j’étais sage car je savais que je devais bien travailler. Mon père était engagé militairement. Il était né en Pologne et il était arrivé en France à 15 ans.
Le début de la guerre
Au début de la guerre, j’avais 7 ans. En 1940, la première loi anti-juif a été publiée. A cause de cela, les juifs ont été privés de tout. Ils étaient privés de leur travail et ils ne sortaient que pendant certaines heures. Puis en 1941, les billets verts, des convocations pour des examens de situation, ont été distribués. Mon père s’est rendu à l’adresse indiquée contre l’avis de ma mère. Il a été arrêté, puis emmené au camp de Pithiviers qui était un camp d’internement en France. Heureusement, grâce à un gendarme, nous avons pu envoyer des lettres à notre père. 
Le premier septembre 1941, l’étoile juive a été instaurée en Europe pour tous les enfants juifs de plus de 6 ans et pour les adultes. Je devais la porter et ma mère me faisait croire que c’était juste une décoration mais, au fond de moi, je savais que non. A l’école, notre directrice a été superbe, elle a dit à tous les enfants de ne faire aucune réflexion sur cette étoile, sinon tout le monde serait puni. Grace à elle la journée se passa bien. Le soir en rentrant, j’ai voulu aller jouer avec les garçons au parc mais le gardien m’a arrêté et il m’a demandé si je savais lire. Je lui ai répondu que oui et il m’a montré une pancarte. Dessus était marqué interdit aux chiens et aux juifs. Les allemands comparaient les juifs aux animaux.
La rafle
Puis le 16 juillet 1942, une grande rafle a eu lieu. Toutes les femmes et les enfants ont été mis dans des autobus pour être déportés au vélodrome du Vél d’Hiv. Ma mère s’est battue pour ne pas partir mais les deux policiers étaient trop forts et nous sommes montés dans le bus. A l’arrivée, nous n’avions ni eau, ni nourriture. On voyait des gens se suicider, avorter et se mutiler. C’était au mois d’août et il faisait très chaud sous le vélodrome alors, pour nous refroidir, des pompiers venaient de temps en temps et nous aspergeaient d’eau avec leur lance. Ensuite la police appelait des noms et nous montions dans des autobus pour aller à la gare d’Austerlitz pour ensuite monter dans des wagons à bestiaux en plein mois d’août sous la chaleur. On nous avait mis à disposition deux bidons avec de l’eau et du lait. Pour éviter que tout le monde se batte, ma mère dit de faire boire en premier ceux qui en avait le plus besoin c’est-à-dire les nourrissons, les enfants puis les femmes. Nous sommes montés dans le wagon mais il faisait très chaud et les ouvertures étaient en haut pour faire respirer les chevaux. Encore une fois, ma mère est intervenue et a dit de prendre les enfants dans les bras et de les faire respirer en hauteur pour ne pas qu'ils suffoquent.
La vie dans le camp
Arrivées dans le camp de Beaune-la-Rolande près de Pithiviers dans le Loiret, les français avaient besoin d’interprète et comme ma mère parlait allemand elle s’est porté volontaire en pensant qu’elle pourrait savoir ce que les Allemands avaient prévu de faire et elle avait raison. Un jour, elle a entendu que les femmes et les enfants seraient bientôt séparés alors elle décida de mettre une stratégie au point pour pouvoir s’évader. Elle partit voir le chef du campement et elle inventa un mensonge à propos de papiers. Alors ma famille a été libérée et mise dans un train sans policiers, ni gendarmes. C’est grâce à cela que nous avons pu nous échapper en nous glissant entre les rails du train puis nous avons continuées notre chemin vers Paris à pied. Grâce à un facteur, nous avons atterri dans une association qui nous a envoyés dans une ferme loin de Paris. Nous étions six enfants juifs nourris et logés par une femme nommée Jeanne.
Et un jour, la cloche sonna pour annoncer la libération des Juifs. Et nous avons continué à vivre avec ma mère et ma sœur. A la fin de la guerre, les juifs n’ont pas été mal vu mais ignorés alors que les résistants ont été acclamés. »
Ce témoignage a été très émouvant et nous a permis de saisir l’importance des faits qui se sont déroulés à cette époque. On pourrait espérer que cela ne se reproduise pas car l’humanité a sûrement retenu la leçon de cette guerre et les mentalités ont sûrement changé.

 Emilie

Commentaires